jeudi

FESTIVAL N.A.M.E: QUE LA FETE COMMENCE !!

Art point M, collectif d’artistes roubaisien dirigé par la bouillonnante Fanny Bouyllagi organisait, en septembre dernier, pour la troisième année LE festival de musiques et cultures électroniques du Nord de la France. Clubbers infatigables, les organisateurs ont réussi le grand écart entre exigence artistique et jubilation festive. Compte rendu.


Toilet Disco

Quoi de plus pénible (et frustrant) que de lire un compte rendu de fête où vous n’étiez pas… Mission délicate en effet pour votre serviteur de restituer l’atmosphère volcanique de la Condition Publique lors de ce premier Week-end du NAME. Pour cette troisième édition, la bande d’Art point M a vu les choses en grand : après le Tri Postal à Lille, la Condition Publique à Roubaix où réside le collectif. Bien sûr Roubaix n’est pas exactement aussi chic que Calvi, mais l’ambiance de ville industrielle abandonnée, heurtée de plein fouet par le chômage de masse (30% de la population !!), rappelle un peu le berceau américain des musiques électroniques, Détroit. Implantée au beau milieu de ce dédale obscur de briques rouges, la Condition Publique, ancien lieu de conditionnement du textile, est aujourd’hui reconvertie en manufacture culturelle et accueillait Pan Sonic, le premier soir du festival. Le show expérimental industrialo-bruitiste, un peu fatigant, du duo finlandais nous a définitivement poussés vers le hot spot de la soirée : les toilettes !! Rassurez-vous, pas pour un plan closet à la Georges Michael, mais pour partager l’hystérie collective assurée par Toilet Disco, duo franco-anglais formé par Edouard Rostand (le parisien) et Mariano Robles aka Ladymacho (le londonien). Le concept ? ″Euh… bah on passe des disques dans les toilettes″ voilà en substance ce que répond Edouard à un journaliste de France Culture. C’est vrai que ça fait court, mais l’essentiel est ailleurs. Résolument glam (lunettes roses, perruques et autres masques de fourrures…) le duo enchaine les tubes disco, indie ou glam sans complexes avec un seul objectif, faire monter la température. Pari réussi pour ce jeudi soir où les toilettes, transformées en sauna, étaient tellement bondées que des fêtards incontrôlables ont littéralement écroulé un lavabo sur lequel ils avaient trouvé refuge pour hurler les bras en l’air !!

La tête dans les étoiles

Jour 2, vendredi. Les choses sérieuses commencent. Financement du Conseil Général du Nord oblige, le festival se disperse sur plusieurs lieux. Nous prenons donc le métro direction Villeneuve d’Asques, cité à peine plus accueillante que Roubaix, pour assister à un live d’@C+LIA au planétarium. Confortablement installés dans les fauteuils, sous la voute céleste projeté sur le plafond bulle, on se laisse hypnotiser par les images minimalistes : un curseur réagissant aux secousses telluriques de la musique. Pendant 45 minutes, le son passe par des frottements métalliques, des crépitements d’insectes magnétiques, des ondes sonores saturées mêlées à des cordes, des cloches et autres bris de miroir. L’association musique et images fonctionne à merveille pour ce live d’une beauté inquiète.

Encore la tête dans les étoiles, nous nous dirigeons vers la condition publique pour assister au live de FuckPony aka Jay Haze qui rend, avec ce projet, hommage à la house de Chicago. Autant dire qu’à l’écoute du maxi ″Lady Judy″, sorti chez Bpitch, on s’attendait à un live dancefloor moite. Quelle ne fut pas notre déception d’assister à un exercice de style, certes bien référencé, mais tout juste passable, transpirant l’ennui. Après ce live raté, retour aux valeurs sures avec Modeselektor, pour un set remarquable (comme dirait Notre Président), oscillant entre breakbeats hystériques, hip hop et electro ultra efficace. Et pour clore cette soirée, qui mieux qu’Andrew Weatherall ?! Mix impeccable, comme à son habitude, deep, progressif comme seul ce pionnier de la musique électronique anglaise sait le faire.

The Orb, the (bad) dream

Dernier jour. C’est l’été indien à Lille. Tout le monde est en T-shirt, la soirée s’annonce bien, jusqu’à ce que la mauvaise nouvelle tombe : Magda est malade, elle ne jouera pas ce soir. Dommage. L’idée de découvrir l’une des têtes d’affiches de Minus, le label de Ritchie Hawtin, nous réjouissait au plus haut point. Mais tout n’est pas perdu, puisque le live de Petter, le jeune prodige de Border Community, confirme l’excellente impression laissée aux Nuits Sonores. Le suédois sortant de scène, manifestement ravi, s’extasiait sur le lieu, lui donnant l’impression de jouer dans une rave façon 90’s telle qu’il n’a pu en connaître, du fait de son jeune âge (Il n’a que 22 ans !) Mais l’événement de ce samedi soir à Roubaix venait de la présence de The Orb, formation culte, pionniers de l’ambient electro et des chill outs. Alors que leurs dernières productions, parues chez Kompakt, ne retrouvaient pas l’inspiration des débuts, on attendait beaucoup de ce live qui annonçait la sortie de l’album ″the Dream″, présenté comme un retour aux sources, avec les musiciens de la formation originale. Malheureusement, le retour d’Alex Paterson et de ses acolytes a beaucoup déçu : un son plus proche des pires productions du label Realworld, que de l’ambient dubby des origines. Les vocalises pénibles du chanteur nous ont définitivement poussés vers la sortie pour écouter la fin du live d’Audion alias Matthew Dear. Le texan aux identités multiples (Audion, False, Matthew Dear) mixait ce soir là une techno énergique et entêtante, pas toujours avec finesse, mais toujours avec enthousiasme. Enfin, pour terminer la soirée, l’habituée du festival, Jennifer Cardini, dont le talent de DJ ne s’altère pas avec le temps (contrairement à Ellen Alien…), a maintenu tout le public les yeux ouverts et les bras levés jusqu’au petit matin. Un grand moment.


Yann MAUBERT

www.lenamefestival.com
www.myspace.com/namefestival

mardi

Le Réseau des Festivals de Culture Electronique


En mai 2006, MCD publiait un article sur la naissance du réseau des festivals de culture électronique. Un an plus tard, retour sur le projet et ses perspectives.

En avril 2006, les cinq principaux festivals électro français se regroupent pour créer le Réseau des Festivals de Culture Electronique. Nuits Sonores, Astropolis, Nördik Impakt, Marsatac et Calvi on the Rocks avaient alors pour objectif de revendiquer un statut particulier du festival de culture électronique, ni un festival rock, ni un teknival. Un objet culturel spécial qui incarne cette culture qui va du live laptop minimal d’un Taylor Dupree au DJ set libérateur d’un Laurent Garnier en passant par les installations, le VJing, les performances… Bref, un espace d’expression offert aux créateurs du XXIème siècle.

Plus concrètement, le réseau a également une vocation militante, même si, comme nous le rappelle la coordinatrice du réseau, Sabine Duthoit du festival NAME : « Notre objectif, c’est d’abord de créer un réseau, pas un syndicat, on se voit plutôt comme une plateforme d’échanges et de discussions » Pas un syndicat, donc. C'est-à-dire, une structure légère qui tente de défendre sa spécificité auprès des institutions, mais loin d’une logique de revendication ou de contestation. Et Sabine de poursuivre : « Entre nous, on discute des problèmes de sécurité, de programmation, des relations avec les institutions, de coproductions… »

Alors quoi de neuf depuis la création du réseau en avril 2006 ? Deux petits nouveaux : NAME à Lille et Electroni[k] à Rennes. La grande nouveauté, c’est également d’avoir pris l’initiative de nommer une coordinatrice pour recueillir et échanger les informations. Jusqu’en novembre prochain, c’est donc Sabine Duthoit qui assure cette fonction. Autre décision pour améliorer l’efficacité du réseau : Se réunir plus souvent et notamment au moment des différents festivals.

Mais le gros projet du réseau est ailleurs. Pour lui donner vie, les festivals associés réfléchissent à un événement commun, une sorte de festival des festivals où tous les talents et toutes les énergies se mutualiseraient pour donner naissance à un projet de grande ampleur. Pour l’instant, le projet est toujours en gestation, dès qu’il y a du nouveau, on vous tient au courant, c’est promis…


YM

NUITS SONORES 2007 - WET WET WET


Au programme de ces 5emes Nuits Sonores, évidemment rien que du lourd !! On n’en attendait pas moins du meilleur festival de cultures électroniques français. Sur le papier donc, un savant mélange de têtes d’affiches vues et revues : UR, Ellen Alien, Miss Kittin…, d’artistes qu’on suit depuis moins longtemps comme Apparat, Petter ou Danton Eeprom, mais aussi du culte avec les Violent Femmes, FM Einheit et le mythique guitariste des Cramps et du Gunclub, Kid Congo, l’un des grands moments de ces nuits lyonnaises.

Dancing in the rain

Pourtant, tout avait plutôt mal commencé. Coincés dans les bouchons des quais de Rhône à 18H00, sous une pluie diluvienne, nous avons du laisser de côté les règles élémentaires du code de la route pour nous ruer à la galerie des terreaux et récupérer in extremis les accréditations. Bref, un premier jour de festival, avec une pluie qui décidemment ne s’arrête pas… Comme lors des précédentes éditions, les Nuits Sonores ont offert une carte blanche à une ville, cette année : New York. Notre périple nous a donc logiquement mené au jardin de l’ELAC, sur le toit de la Gare Perrache, en plein cœur de Lyon, pour écouter les DJ sets de l’écurie DFA : the Juan Mac Lean et Shit Robot. Lieu magique, bon son, la nuit peut commencer. Cette année, les nuits se déroulent aux Subsistances, un ancien couvent du XVIIème sur les quais de Saône, reconverti en lieu de résidence. Trois scènes : La verrière, le hangar et une scène extérieure dans la cour. Déluge oblige, tout le monde sous la verrière pour écouter le live du gang de Made Mike aka Interstellar Fugitives aka Underground Resistance. Toujours masqués, toujours énervés, mais toujours pareil… Après les grands anciens, la star de la techno lyonnaise devenue depuis incontournable s’essayait pour la première fois au live. Pas toujours au point, manquant de fluidité, ce premier essai ne fut pas vraiment transformé. (Il l’est depuis le 02 juin dernier où Agoria jouait son live pour la deuxième fois au festival Europavox à Clermont Ferrand)


Rave n’roll !!

Jeudi 15:00, toujours la pluie, on en profite pour aller voir l’expo de la Sprinkle Brigade, un collectif d’activistes New Yorkais qui œuvre pour « l’embellissement urbain »… C’est donc au nom de cette noble cause que ces doux dingues mettent en scène les déjections canines, les transformant tantôt en sculptures, tantôt en poupées, en situation avec des playmobiles, repeintes, désignées… Bref après Philippe Katerine qui collectionne ses propres étrons, on peut sentir le début d’une tendance lourde !!

Après la sculpture fécale, passons à l’architecture musicale avec le collectif Architek qui, cette année encore, faisait partie du circuit électronique et avait réinvesti pour l’occasion le garage Citroën. Côté son, on commence avec le collectif lyonnais Fits Artstep, qui nous emmène de l’electro jazz de Blinks au live Hard Tek de Ty von Dixit en passant par les breaks sauvages de Sound Invadaz. Viendront ensuite Luke Vibert et Water Lili pour faire bouillir le garage qui s’en souviendra longtemps. Sans perdre de temps, nous filons sur la péniche voir le marseillais Danton Eeprom, qui vient de monter son propre label Fondation, (on vous en reparle bientôt) et qui nous a offert un live des plus rock n’roll, finissant au milieu de la foule en délire à la manière d’un Iggy Pop au système pileux développé. Dantesque !


Kid Congo : Classe.


Vendredi : Retour aux subsistances pour la troisième nuit, accueillis par le live d’Apparat. Intense, psyché, druggy, trancey…les adjectifs manquent pour chanter les louanges du compère d’Ellen Alien qui a embarqué toute le public dans son voyage. Après cette performance, les sets de Loco Dice et de Damian Lazarus apparaissent bien fades. On commençait presque à ressentir de l’ennui quand le magistral Kid Congo monta sur scène. Ex guitariste des Cramps et du Gun Club, compositeur entre autres du redoutable Sex Beat, ce new yorkais latino, gay, revenu de tous les excès impose son attitude de félin freaky. Un charisme quasi mystique !! Côté musique, des reprises de Gun Club (sex beat, she’s like heroin to me), des titres de son nouveau groupe les pink monkey birds, dans la pure tradition du psychobilly, à la fois puissant, low tempo et terriblement… sexuel !

Le lendemain, dernier soir, rendez vous à la Chapelle de la Trinité pour assister au concert exceptionnel autour de l’œuvre vidéo de Christian Marclay. Trois équipes de musiciens proposaient trois bandes son. Les premiers Mark Cuningham (cofondateur du groupe MARS avec Arto Lindsay), Pierre Bastien et DJ Olive furent de loin les plus intéressants, le souffle hiératique de la trompette de Cuningham flottant, en apesanteur, au dessus des atmosphères mécaniques et bruitistes créées par Bastien et Olive. Le second projet fût de loin le plus barré : JG Thirlwell, figure de l’underground New Yorkais, FM Einheit (membre fondateur d’Einstürzende Neubaten) et Frederick le Junter. Les briques écrasées sur les tôles et la perceuse d’FM Einheit ont eu raison des tympans de plusieurs personnes … Enfin le dernier projet mené par ErikM, Jérôme Noetinger et Dieb 13 fut de loin le plus décevant. Volontiers redondant, la partition n’a jamais réussi à s’extraire de l’œuvre de Marclay.

Pour terminer la nuit, dernier passage par les Subsistances où nous attend le live du dernier poulain de l’écurie Border Community, le suédois Petter. La claque !! Un son bien dans l’esprit du label anglais, végétal et psyché, qui décidemment reste une des valeurs sures du moment. 6 :00, on sort du live de Yuksek, qui a transformé le Hangar en Hamam, vidés mais biens. Vivement l’année prochaine.

YM